POINT DE VUE

2014

Point de vue remarquable à cinquante mètres !

Les cartes routières ne manquent pas de nous les mentionner.
La déambulation au sein d’une contrée est émaillée de points de vue à honorer impérativement. Les routes fleurissent de panneaux qui nous exhortent à l’arrêt contemplatif, jusqu’aux sentiers de randonnées où des pancartes nous indexent les panoramas à admirer. Le promeneur est alors en proie à un violent conflit intérieur. En lui, le flâneur indolent tend à se rebeller devant une telle injonction tandis que le touriste scrupuleux craint de passer à côté d’une merveille et serre fébrilement son appareil photo.
Et le photographe, précisément, pas celui d’occasion mais le « professionnel de l’image », l’artiste, le créateur, comment réagit-il ?
Qu’est-ce pour lui, un point de vue ?
En demandant à trente photographes lorrains de produire en une image unique leur point de vue personnel sur notre région, nul risque de sombrer dans un pittoresque de carte postale car « personnel » sous-entend fuite des lieux communs, suppose réflexion voire introspection et en appelle à l’intimité de la relation que l’on nourrit avec son territoire, pétrie de souvenirs, de sensations et de sentiments mêlés.
Malice du terme, le point de vue, angle de vision délibérément choisi parce qu’en embrassant une portion du monde il l’organise en un véritable spectacle, se double d’un positionnement mental, intellectuel, mais aussi sensoriel, qui livre une conception originale, qui traduit une acception particulière de son environnement.
Le paysage et l’architecture ne sont pas nécessairement convoqués dans une telle proposition et, à apparaître, ils n’ont rien du site prestigieux ou du patrimoine d’exception. Plusieurs photographes ménagent place à l’homme. Habitant, citoyen, voisin, prochain. L’homme qui traverse fugitivement l’image, qui affleure dans une vision spectrale ou qui regarde posément l’objectif, celui-là même qui peuple la région, qui toujours en est l’âme, son génie. Et s’il ne figure pas directement sur le cliché, tout trahit pourtant sa présence. Derrière ces maisons, ces friches industrielles et derrière cet épi, la main de l’homme.
Ces photos ne prétendent pas au témoignage, sauf à l’insu de leurs auteurs, du moins pas au sens où l’entendrait un historien ou un sociologue. Sans doute dressent-elles souvent un constat, lucide mais loin d’un quelconque pathos, sur certains aspects de notre région, sûrement livrent-elles un regard alerté sur l’état du monde en général.
Mais elles relèvent toutes, avant tout et in fine, de l’engagement artistique des photographes, plein et entier, elles nous offrent de la Lorraine, par delà l’originalité des points de vue, une vision infiniment poétique.
Pierre van Tieghem, Historien d’Art

Trente photographes

Richard Bato, Jean Yves Camus, Philippe Colignon, Baptiste Cozzupoli, Olivier Nancy, Anne Delrez, Daniel Denise, Eric Didym, Philippe Faivre, Julien Felix, Guillaume Greff, Josef Guinzbourg, Kathya Hann, Stephane Harter, Franck Hommage, Jean Michel Husson, Patrick Jacques, Francis Kocher, Patrick Kuhn, Véronique L’Hoste, Maxime Perrotey, Maxime Perrotin, Claude Philippot, Emilie Salquèbre, René Taesch, Mélanie Tisserant, Amandine Turri Hoelken, Jacqueline Trichard, Jérôme Sessini, Emilie Vialet

partenaires

Région Lorraine, Conseil départemental de Meurthe-et-Moselle,
Château des Lumières, Surface Sensible